Claire P., illustratrice jeunesse

Publié le 02/03/2018 par Claire Loup
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« J’ai pris mes premiers cours de dessin en primaire » se souvient Claire Peron, dite Claire P., illustratrice jeunesse depuis plus de dix ans. « Enfant, mes parents me disaient qu’on ne gagne pas sa vie en étant artiste ou dessinatrice, mais malheureusement pour eux j’ai vite appris que Picasso avait été très riche. Je n’ai pas changé d’idée ! »

Ses années lycée en section littéraire l’ouvrent à l’univers du livre : « Je sentais que je voulais être actrice de ce monde-là, raconter des histoires, mais par le dessin. » Après son bac, Claire décroche un DMA (diplôme des métiers d’arts) suivi d’un DSAA (diplôme supérieur d’arts appliqués) en illustration médicale et scientifique obtenus à l’École Estienne.  « Personne ne vous demandera jamais votre diplôme dans ce milieu-là. Pour moi, l’intérêt de passer par une grande école, outre la qualité de la formation, c’est l’émulation artistique et intellectuelle dans laquelle ça nous plonge. » 

Claire Perron exerce son activité au sein d’un atelier partagé nantais, Oasis 4000. « On a un métier très solitaire. Ça permet donc d’intégrer un réseau, de démarcher des projets en commun pour les collectifs, de partager des contacts, de comparer nos contrats. C’est important. » 
Les illustrateurs travaillent souvent en binôme avec des auteurs choisis par les maisons d’édition, dont ils reçoivent les textes accompagnés d’un cahier des charges très précis concernant les illustrations. « Il faut être capable de répondre dès le départ à des demandes très diverses pour multiplier les commandes, et surtout, il ne faut jamais s’arrêter,  beaucoup démarcher » prévient Claire.  

Presse jeunesse, bande dessinée, applications pour tablettes, livres scolaires : l’illustratrice est sur tous les fronts.  « La polyvalence c’est l’une des clés de la réussite. Je collabore avec le magazine Toupi (3/6 ans) en leur fournissant un strip par mois (une histoire en 3 cases) ; l’idée c’est d’avoir un dessin à la fois rigolo et éducatif qui traite d’un sujet donné. Je travaille au crayon et je colorise sur ordinateur, comme pour la bande dessinée qui m’a été commandée par les éditions Gulf Stream afin d’évoquer le thème du racket à l’école – mais en BD, le travail sur la narration et sur la création de personnages est évidemment plus important qu’en presse. Pour l’application Bayam, je travaille directement sur l’ordinateur sans phase de crayonnage mais à part ça, il n’y a pas de grosse différence : j’ai un scénario à découper en séquences illustrées avec une histoire à raconter.

Un travail en liberté ?

« Être freelance est une liberté relative, nuance Claire. Il n’y a jamais de rythme fluide : soit on manque de commandes et c’est l’angoisse, soit c’est le rush, on croule sous les projets et dans ces cas-là, on travaille en soirée comme le week-end. Ça implique de bien gérer ses revenus parce qu’on ne touche ni chômage ni congés payés. »

Les illustrateurs sont des travailleurs indépendants qui cotisent à la Maison des Artistes ; ils sont payés au forfait pour la presse et en à-valoir (avance sur droits) et droits d’auteurs pour la bande dessinée et les albums jeunesse. « Il ne faut pas hésiter à parler d’argent, même si on n’aime pas ça. Les négociations avec les clients, les éditeurs, c’est une très grosse partie de ce métier. »
La commande présente l’avantage de garantir une rémunération, contrairement aux projets personnels sur lesquels on travaille sans certitude de les vendre.

Récemment, Claire Perron a pourtant décidé d’accorder plus de temps à ses projets personnels qui lui ressemblent davantage. « J’ai déjà créé un jeu, La Météo des émotions, et j’ai envie de lancer mes propres albums pour enfants. » La profession s’est beaucoup précarisée ces dernières années – revenus en baisse, rythme très soutenu – malgré un marché très florissant qui mobilise fortement les auteurs et illustrateurs. 


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