Le Lac, de Jean-Pierre Suaudeau

Publié le 20/09/2017 par Gérard Lambert-Ullmann
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Le Lac, le nouveau récit de l’écrivain nazairien Jean-Pierre Suaudeau, nous amène au cœur d’une ouate de souvenirs flous de situations vécues dans l’enfance, 35 ans auparavant. . . Lecture de Gérard Lambert-Ullmann.

C’est un pays où “semble régner un effroyable et mortifère consensus” et dont les habitants sont “sages comme des images tristes”.

Dans ce “décor d’opérette alpestre”, on suit le narrateur qui erre au cœur d’une ouate de souvenirs flous de situations vécues dans l’enfance, trente-cinq ans auparavant, cherchant un lieu improbable, en proie à l’inquiétude de “ne pas être à la hauteur de la tâche (qu’il s’est) fixée” et dont on hésite à se faire une idée précise. On avance lentement avec lui, fastidieusement, soumis à une étrange anxiété. Il y a quelque chose de pesant, d’oppressant dans cette quête, ou plutôt cette enquête, qui ne cherche “ni le meurtrier (il était connu), ni les complices (il en était), ni les mobiles, ni la victime : seulement le lieu du crime”. Oppression “feutrée” accentuée par le style de l’auteur, le rythme des phrases, la présence détaillée de lieux, de passants éphémères, de gestes insignifiants. Ça pince le cœur, mais à travers une brume. Et toujours il y a le lac, plat et gris ; étendue d’eau “comme fatiguée, lasse, à jamais assoupie comme tout semble l’être ici”.

On l’aura compris: cette sorte de thérapie pour conjurer la “malédiction” n’est pas gaie. Mais elle est prenante. Et l’on se surprend à suivre obstinément ce vieil enfant “plein d’une mélancolie qui fortifie au lieu d’abattre”. Finalement, avec lui dans le train de retour vers Nantes, on est heureux de constater que le projet initial d’une fiction dérisoire est “tombé dans l’eau du lac”. De cette noyade est né un récit poignant, bien plus fort qu’un roman vague(lette).

Le lac, de Jean-Pierre Suaudeau, Publie net, 155 p. 15 €, ISBN 9782371774797.

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