Ecrire l’Apocalypse, de Emmanuel Adely, Jean-Pascal Dubost, Patrick Goujon, Éric Pessan et Carole Zalberg

Publié le 06/02/2017 par Gérard Lambert-Ullmann
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Issus des résidences d’écrivain à Angers, les cinq textes de l’anthologie Écrire l’Apocalypse évoquent petites et grandes catastrophes, détresses individuelles et collectives, et forment ensemble un panorama d’un désastre “civilisé” dont l’apocalypse pourrait bien être l’autre nom.

La tenture de l’apocalypse, chef d’œuvre médiéval, et Le chant du monde qu’elle a inspiré à Jean Lurçat au 20ème siècle, sont deux tapisseries monumentales qui se répondent dans le cadre patrimonial de la Ville d’Angers. Fière de ces œuvres magistrales la ville a invité en résidence, entre 2011 et 2015, cinq écrivains aux approches et styles différents, pour répondre au défi d’évoquer l’apocalypse aujourd’hui.

Pari réussi : au fil de ces cinq textes, petites et grandes catastrophes, détresses individuelles et collectives, se croisent, se parlent, et forment ensemble un panorama d’un désastre “civilisé” dont l’apocalypse pourrait bien être l’autre nom. De Tchernobyl en Fukushima, de marées noires en gaz à effet de serre, d’îlots plastiques dans les océans aux empoisonnements par l’amiante, des couples déchirés et corps maltraités (Patrick Goujon) aux chômeurs s’immolant par le feu devant Pôle emploi (Emmanuel Adely) aux guerres et terrorismes qui ravagent la planète, cette impressionnante “Ballade des perdus” nous interpelle, portée par la puissance de mots comme seule la poésie et la littérature savent en trouver  : “Il est 20 h, l’heure des catafléaux, des désastrophes, des catakrashes, des caladrames, des accitentats, des désochaos, des tsubordements, des nuclédations, des polludictions, des bouleversedrames” (Jean-Pascal Dubost).
Car dire ces moments où “le monde a peut être basculé” (Eric Pessan) ne pouvait se faire sans que le langage ne soit mis à contribution hors des sentiers balisés d’une prose sagement assise. Il y fallait aussi des écritures frappées, de diverses manières, par la “peur de plomb partout suintant” (Carole Zalberg). C’est fait  : cinq textes nous apostrophent et nous appellent à réfléchir sur les temps qui viennent comme sur le rôle que la littérature peut y jouer.

Écrire l’Apocalypse, Emmanuel Adely, Jean-Pascal Dubost, Patrick Goujon, Éric Pessan, Carole Zalberg, Préface de Philippe Forest, Postface de Antoinette Bois de Chesne, Éditions Joca Seria, 105 p. 10 €, ISBN 9782848092782.